Prisonnier des Vikings by Nancy Farmer

Auteur:Nancy Farmer [Farmer, Nancy]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Écoutez, têtes couronnées, car je vais vous parler

Des splendeurs du combat et d’Olaf le Valeureux.

Ce guerrier généreux qui sème la terreur.

Chanceux sont ceux qui vivent dans sa maison,

Baignée de splendeur, de trésors et de gloire.

Les hommes à tête de loup l’appellent « chef »

Les briseurs de crânes d’Odin l’appellent « ami ».

Jack prit de l’assurance à mesure qu’il chantait. Il finit par oublier le public. Et même la reine. La force de vie scintillait autour de lui, malgré le thème sanglant de l’ode. Elle était attirée, se disait Jack, par la beauté de la poésie de Rune. Elle rendait chaque vers plus vivant et faisait vibrer sa voix. Il sentait vaguement la présence d’un des envoyés d’Odin, un corbeau, perché sur la charpente du toit au-dessus de sa tête. Cela le troubla l’espace d’un instant, mais il l’oublia très vite.

Quand il eut terminé (c’était un très long poème), un silence absolu régnait dans la grande salle. Même le feu avait cessé de crépiter. Et soudain, les applaudissements éclatèrent.

— Formidable ! Formidable ! brailla Pied de Bois en essuyant ses larmes avec sa barbe.

— Ça en bouche un coin, hein ? hurla Éric Belle Face.

— J’ai beaucoup aimé le passage où il parle des crânes qu’on fracasse, commenta Egil Long Pieu.

— Et le sang dans lequel on patauge jusqu’aux genoux, ajouta Sven le Vengeur.

— C’est injuste ! s’exclama Thorgil. Jack a droit à tous les honneurs alors qu’il n’a rien fait ! Il ne s’est jamais battu, il n’a jamais rien pillé !

Rune était assis dans son coin, un petit sourire aux lèvres. Les compliments coulaient autour de lui comme du miel chaud. Jack aurait aimé lui rendre hommage, mais il savait que ce serait dangereux dans ces circonstances. Peut-être un jour pourrait-il lui témoigner sa gratitude.

— Quelle charmante mélodie, dit la voix flûtée de la reine dans son dos.

Bizarrement, la façon dont elle avait dit cela semblait une critique. Jack se retourna vivement, prêt à défendre l’art du vieux guerrier. Mais il se souvint à temps du danger encouru et transforma son geste en une révérence.

— Tu ne trouves pas que c’est une jolie mélodie, Lucy ? demanda la reine.

La fillette, qui s’était assoupie sur les genoux de Frith, se redressa et hocha la tête.

— La vie était monotone depuis quelque temps, reprit la reine. Notre nouveau skald nous réserve bien des joies.

— C’est mon frère, déclara fièrement Lucy.

— Raison de plus pour qu’il vive avec nous. Tu ne crois pas, monseigneur ?

« Olaf, fais quelque chose ! » pensait Jack.

Ivar se leva. Il était d’une pâleur cadavérique et paraissait épuisé, comme si une maladie le rongeait.

— Ce skald est-il un cadeau, Olaf ?

— Non, mon vieil ami, répondit le géant avec simplicité. Je t’ai donné une grande partie de mon butin. Je l’ai fait en toute liberté et de bon cœur. J’ai capturé cet énorme cochon-troll à la frontière de Jotunheim et je te l’ai offert pour le sacrifice à Freya. Cela ne te suffit pas ?

Ivar baissa la tête.

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